Mieux comprendre la maladie, grâce au premier registre belge de l’AOH

PATIENTDAYLEUVEN_DRIESLUYTEN-36
Suivez-nous sur Facebook !

Comment les médecins diagnostiquent-ils l’AOH ? Quels traitements prescrivent-ils ? Et quel est l’impact de la maladie sur votre vie quotidienne ? Ces données ont été rassemblées dans le premier registre belge des patients par l’UZ Antwerpen, en collaboration avec huit centres belges de l’AOH. L’objectif ? En savoir plus sur la maladie, pour parvenir à des traitements meilleurs, plus abordables.

C’est l’UZ Antwerpen qui est à l’initiative du registre, sous la direction du professeur Didier Ebo. En collaboration avec huit centres belges de l’AOH, il a collecté de nombreuses données entre 2018 et 2022, notamment à travers des questionnaires remplis par les patients.

L’importance du registre des patients

Ces données sont collectées dans le tout premier registre belge de l’AOH, qui vise à mieux comprendre l’AOH, une maladie rare – le but étant d’aboutir à des progrès scientifiques.

Mais ce n’est pas le seul objectif du registre, explique le professeur Ebo : « L’impact sociétal d’un tel registre est très important. Avec de meilleures données sur les patients belges atteints d’AOH, nous pouvons demander plus de remboursements à l’INAMI et donc permettre à plus de patients d’accéder au traitement. »

L’information aide les patients

Car c’est bien cette frustration qui a poussé à créer le Registre, admet le professeur Ebo. « Nous ne disposions d’aucune donnée sur les patients en Belgique. Et un problème méconnu est toujours négligé. L’AOH est inconnue du grand public, mais aussi de l’INAMI et du SPF Santé publique. Ce manque de données complique le plaidoyer en faveur des remboursements. Il existe pourtant bon nombre de nouvelles thérapies très efficaces, mais elles sont très coûteuses. Pour obtenir plus de remboursements, nous devons donc convaincre les pouvoirs publics à l’aide de données. Et nous les avons enfin. »

Qui sont les patients atteints d’AOH en Belgique ?

En Belgique, l’AOH survient chez 1 personne sur 65.000. 180 patients ont été identifiés. « Cela signifie que nous connaissons presque tous les patients belges. Il y a donc peu de personnes atteintes d’AOH qui ne savent pas qu’elles ont la maladie », explique le professeur Ebo.

125 des 180 patients ont répondu au questionnaire : 75 femmes, 50 hommes. Douze d’entre eux avaient moins de 18 ans. La plupart d’entre eux – 112 patients sur les 125 – ont un AOH de type 1 ou de type 2. Treize patients n’appartiennent pas au type 1 ou 2, mais à un groupe de patients hétérogène, présentant des différences majeures.

De la poussée au diagnostic

Qu’est-ce qui ressort parmi les 112 patients atteints de type 1 ou 2 ? Professeur Ebo : « Ils subissent leur première poussée à un âge médian de 13,5 ans. Pourtant, le diagnostic ne tombe qu’autour de leurs 20 ans. C’est une différence de 7 ans, souvent même plus. Nous voulons raccourcir ce délai, afin que les patients puissent mener une vie normale plus rapidement. »

Les premiers symptômes sont similaires chez beaucoup : « Chez la majorité, il s’agit d’un gonflement des bras et/ou des jambes. » Sur les 112 patients, 100 avaient déjà subi un gonflement. « Les 12 personnes sans gonflement sont des parents au premier degré d’un autre patient AOH, chez qui nous avons dépisté l’AOH après des tests, même si elles n’ont jamais eu de symptômes. »

Sur les 100 ayant présenté des symptômes, 80 les ont eu au cours de l’année écoulée. Et ils étaient souvent graves, car parmi ces 80 personnes, une sur trois a été admise aux urgences au cours de cette année.

Quels sont les traitements à privilégier

Le questionnaire s’est également penché sur les traitements des patients. Professeur Ebo : « En cas de crise aiguë, la majorité des patients se voit administrer un traitement intraveineux avec un inhibiteur de l’estérase C1. » 

Si ceci n’a rien d’étonnant, l’enquête a également révélé des informations surprenantes et parfois problématiques. Professeur Ebo : « Ce qui est frappant, c’est que pour le traitement à long terme, bon nombre de gens reçoivent des médicaments qui ne font plus partie des traitements actuels. Lors d’une poussée aiguë, certains patients ont même été traités avec un médicament qui freine les réactions allergiques, alors que ceux-ci ne conviennent pas du tout. »

Les patients ont également indiqué ce qui était le plus pénible à leurs yeux. Professeur Ebo : « Les gonflements dans l’abdomen sont très douloureux et gênants, d’après de nombreux participants. Ce qui a également un impact majeur, c’est quand un diagnostic erroné est posé au moment d’une (première) poussée, entraînant parfois une intervention chirurgicale inutile. »

Lisez-en plus ici sur les médicaments disponibles.

Le stress est le principal déclencheur

Le registre identifie les déclencheurs potentiels des poussées. « Le stress est un déclencheur très important, selon l’enquête. L’activité physique est un autre déclencheur. Mais l’activité en question n’est pas la même d’un patient à l’autre. Parfois, un mouvement répétitif comme le repassage suffit. »

« Ensuite, il y a les œstrogènes. Il est donc déconseillé aux patientes d’utiliser des contraceptifs à base d’œstrogènes. De leur côté, les interventions dentaires ou chirurgicales constituent une forme de stress ‘mécanique’, qui peut déclencher une crise. Par conséquent, nous vous recommandons de prendre des médicaments de manière préventive lors d’une intervention chirurgicale requérant une anesthésie générale, par exemple. Dans la perspective d’une telle opération, mieux vaut discuter des mesures préventives avec votre médecin. »

L’impact de l’AOH sur les relations sociales

Bien entendu, une maladie imprévisible comme l’AOH a un impact sur la vie des patients. Le registre permet de chiffrer cet impact, ce qui est en soi un argument important pour demander un remboursement auprès de l’INAMI.

Professeur Ebo : « La moitié des patients ont déclaré avoir dû s’absenter du travail ou de l’école au cours de l’année écoulée. En moyenne trois fois, mais il y avait aussi des cas exceptionnels allant jusqu’à 20 absences par an. »

Il ne faut pas sous-estimer l’importance d’un environnement compréhensif pour mener une vie normale. Mais ce n’est pas évident, comme le prouve le registre. Professeur Ebo : « Trois patients ont indiqué que leur école ou employeur se montrait peu compréhensif. Ça me choque. »

 L’AOH freine la vie sociale d’une personne sur trois : elles n’osent plus voyager, pratiquer de loisirs… « Alors que c’est tout à fait possible, si on est bien préparé. »

Ce premier registre montre qu’il y a une belle marge d’amélioration. Professeur Ebo : « C’est pourquoi le registre 2.0 est en préparation. En le comparant au premier registre, nous espérons voir une évolution favorable. » Alors ne manquez pas de remplir à nouveau le questionnaire.

Lors de la Journée des patients AOH, le 6 mai dernier, le professeur Ebo a donné plus d’explications sur le registre. vous pouvez revoir son intervention ici