Un diagnostic correct grâce à un journal de poussées
Longtemps, elle a pensé qu’elle avait l’une ou l’autre intolérance alimentaire. Jusqu’au jour où sa première vaccination contre le Covid et son journal ont permis d’enfin établir un diagnostic : Yolaine est atteinte d’AOH de type III. Depuis, elle reçoit le bon traitement et elle a retrouvé une certaine sérénité – et sa famille aussi.
Ses premières poussées datent de 2012. Au début, elles étaient peu prononcées : une lèvre ou une langue légèrement gonflée. Rien de bien grave, se disait-elle. « À l’époque, j’étais souvent en déplacement pour le travail. C’est pour ça que je ne suis pas allée immédiatement voir un médecin. Pourtant, ces crises m’ennuyaient beaucoup : elles survenaient à tout moment de la journée, de manière imprévisible. »
Pas de certificat médical
Quand Yolaine a vécu son premier gonflement sévère, au niveau de la lèvre inférieure, son médecin l’a envoyée chez un allergologue. « En même temps, je suis allée voir un spécialiste dans un autre hôpital », se souvient-elle. « En quelques mois, j’ai fait tous les tests d’allergie possibles. Mais ils n’ont rien donné. Finalement, le spécialiste m’a renvoyée en me disant qu’il n’y a pas d’explication médicale à tout. »
Yolaine n’est pas satisfaite de cette explication. De plus, les médicaments contre les allergies qui lui ont été prescrits n’arrangent rien. « C’est pourquoi j’ai commencé mes propres recherches. Je suis de nature curieuse et analytique », dit-elle. « Je suis parvenue à la conclusion que je ne souffrais pas d’allergies, mais d’intolérances alimentaires. Dans ces cas, le corps ne réagit pas nécessairement immédiatement, ce qui complique l’établissement du lien entre un produit particulier et la réaction. Je mangeais déjà sainement, mais à partir de ce moment-là, je suis allée plus loin et j’ai réduit au minimum l’ingestion d’aliments transformés et ultra-transformés. »
Documenter ses poussées
Dès le début, Yolaine consigne ses poussées. Pas étonnant, car dans son travail aussi, elle utilise des logiciels et des données. « Depuis 2012, je note toutes les informations sur mes poussées : la date, l’heure, le lieu du gonflement et le contexte, afin de repérer d’éventuels déclencheurs récurrents. Et je prends des photos à chaque fois. »
Comme elle ne trouve pas de point commun à ses poussées, Yolaine ne comprend pas ce qui les provoque. Pourtant, elle est convaincue de connaître le déclencheur de ses poussées en 2012. « Les hormones », affirme-t-elle. « Je suis entrée en périménopause très tôt, et mes hormones ont été complètement chamboulées pendant un certain temps. Dès que je suis vraiment arrivée à la ménopause, mes crises se sont calmées et je suis entrée dans une période de rémission pendant quelques années. Les poussées hebdomadaires sont devenues périodiques. C’est typique d’AOH avec inhibiteur C1 normal, m’a expliqué mon spécialiste : il ne se manifeste qu’à un âge plus avancé. Et il est particulièrement fréquent chez les femmes. »
Si elle documente si minutieusement ses crises, ce n’est pas seulement pour déterminer les déclencheurs. « Dans la période avant mon diagnostic, cela a contribué à convaincre les médecins de la gravité de mes crises. Parfois, ils se montraient sceptiques quand je leur expliquais mon cas. Mais quand je leur montrais les photos, leur regard changeait. Malheureusement, ça n’a pas permis d’aboutir à un diagnostic. Le premier allergologue que j’ai consulté avait testé mon sang pour dépister l’AOH, mais il n’avait rien trouvé. À cette époque, l’AOH avec inhibiteur C1 normal n’était pas encore connu. Et ce qui distingue le type III, c’est qu’on ne présente pas la déficience en inhibiteur de C1-estase, caractéristique des types I et II. »
Yolaine tient son journal aussi pour elle-même : « Il me donne un aperçu à long terme. Cela me rassure de constater que les poussées diminuent, ou qu’elles deviennent moins graves. »
Neuf ans plus tard : enfin un diagnostic
Jusqu’en 2021, sa maladie est restée raisonnablement sous contrôle. Jusqu’à ce qu’elle reçoive son premier vaccin contre le coronavirus. « Le matin, je me suis fait vacciner et le soir, j’ai eu ma première poussée violente. La plus sérieuse depuis des années. À partir de ce moment, j’ai eu une crise tous les deux jours. Quand j’ai entendu un reportage à la radio autour d’un effet secondaire grave du vaccin, qui causait des gonflements, je suis immédiatement allée chez mon médecin. Celui-ci m’a envoyée chez une nouvelle pneumologue-allergologue. Elle a regardé mon journal et mes photos et m’a dit : vous avez un AOH avec inhibiteur C1 normal. »
Des analyses de sang ont confirmé le diagnostic que laissait présager son journal. « La spécialiste soupçonnait que ma vaccination avait été un déclencheur grave, qui avait relancé tout le processus. »
Après toutes ces années, le calme est enfin revenu dans sa vie. Son anxiété et son stress de voir surgir une nouvelle poussée à tout moment ont diminué. « J’ai toujours mes médicaments sur moi et mon portefeuille contient une carte avec tous mes détails médicaux. Si je me retrouve aux urgences, le personnel peut savoir immédiatement ce qui m’arrive et quel traitement je dois recevoir. Car de nombreux médecins urgentistes ne connaissent pas la maladie. Mon cousin est médecin urgentiste et lui aussi, j’ai dû lui expliquer ce qu’est l’AOH. »